Salut tout le monde ici c'est @fancybrothers !

Bienvenue dans la deuxième partie de cette série qui traite les grands chapitres psychiatriques. L'objectif de cette série est simple, permettre aux gens de faire la différence entre les troubles psychiatriques majeurs et pourquoi pas ça pourra les aider à consulter un psychiatre le jour où ils détectent des signs alarmants quelque part dans leur entourage social. La deuxième raison pour laquelle j'ai décidé d'écrire cette série est le caractère 'mystérieux' de cette profession, beaucoup de gens aujourd'hui ne reconnaissent pas exactement ce qui fait un psychiatre et croient qu'il est entouré par des fous 24/24. Finalement, je suis un grand fan de cette spécialité médicale et donc je  veux essayer comme toujours de détruire quelques stéréotypes. Si vous avez raté l'introduction globale de cette série, consultez cet article...

Aujourd'hui, on va traiter une maladie mentale très fréquente et représente un peu le profil global d'un malade psychiatrique typique, c'est la schizophrénie !

Un peu d'histoire...

Comme nous avons déjà discuté dans le premier article, la psychiatrie est un domaine de recherche et d'application assez jeune, elle est née juste au début de XIX siècle. Cent ans plus tard, Le mot "schizophrénie" est né lors d'une conférence en Allemagne inventé par un psychiatre suisse appelé "Eugen Bleuler', l'origine de ce mot est grecque et signifie la scission de l'esprit, ce mot est utilisé pour désigner le comportement anormal des malades. 

Cette fameuse conférence est faite en 1908, le titre de l'exposé choisi par Eugen était "la démence précoce". La démence est définie une dégradation accélérée des capacités cognitives, ce n'est pas une maladie proprement dite mais un résultat final de plusieurs maladies neurologiques (AVC, Alzheimer..). 

Avant l'utilisation du mot schizophrénie, cette maladie a été considéré comme une démence qui frappe initialement les adolescents d'où l'appellation "démence précoce" proposée par un autre psychiatre allemand "Émil Kraepelin'", Eugen a voulu démontrer que la physiopathologie de cette maladie est totalement différente du développement d'une démence chez un sujet normal et il a reussi à convaincre la société psychiatrique par la pertinence de ses travaux.

L'utilisation du mot "psychiatrie" n'est devenue commune qu'après la publication d'une monographie par Bleuler en 1911.Aujourd'hui la schizophrénie a connu un immense progrès dans la compréhension de sa physiopathologie et son traitement grâce à l'effort de dizaines des chercheurs à travers le monde, elle est classée dans les maladies de siècle...

Comment diagnostiquer une schizophrénie ?

Le diagnostic final passe généralement par une longue période de surveillance pour confirmer la nature de la maladie car c'est une pathologie chronique qui accompagne le malade tout le long de sa vie. La schizophrénie est une pathologie de l'adulte, elle s'installe quand le cerveau atteigne sa maturité vers 20-30 ans, avant cet âge, le cerveau est extrêmement plastique, c'est-à-dire capable de former des liaisons neuronales facilement et cette plasticité cérébrale infantile fait que les altérations morphologiques prennent du temps pour se fixer définitivement.Le tableau clinique d'un schizophrène est très polymorphe et chaque malade est unique, pour faciliter le diagnostic, il existe des critères bien définies dans le DSM 5 (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, voir l'article précédent pour plus d'informations), ce qui facilite énormément la tâche des psychiatres. Malheureusement c'est hyperspécialisé, donc on ne va pas le voir en détails vu que cet article vise la population générale. 

Durant la phase d'état et après la fixation de la schizophrénie,  on peut classer les symptômes en 4 syndromes principaux:

Syndrome positif:

C'est la pièce angulaire du diagnostic, il comporte le délire chronique et les hallucinations. Je vois souvent une grande confusion entre ces deux termes, le délire veut dire une croyance inébranlable par le malade, si par exemple le malade croit qu'il est capable de s'envoler et on le montre que c'est impossible de le faire, il reste attaché à sa croyance malgré la preuve irréfutable, d'ailleurs, les thèmes de délire sont vraiment illimités et peuvent toucher tous les aspects de la vie donc on peut tout voir. Quant aux hallucinations, ce sont des vraies perceptions sans stimulations. Elles peuvent toucher tous les cinq sens mais généralement elles sont soit auditives soit visuelles. En plus, elles peuvent être intra-psychiques et dans ce cas, le malade décrit une voix interne. Finalement, le malade peut être soumis à un syndrome d'automatisme mental où il ne peut pas contrôler son propre cerveau et se trouve obligé à répéter des actions, des mots, des pensées etc.

Syndrome négatif:

Il caractérise tous les symptômes dits "négatifs", ce sont le résultat d'un appauvrissement des processus psychiques, sociales, cognitives, affectives du malade. le retrait social et la diminution du discours sont les deux premiers signes décrits par Eugen Bleuler, ils sont la conséquence directe d'une diminution de la capacité à prendre des décisions et faire des choses. L'aboulie c'est la perte de volonté pour faire les choses, elle est fréquemment aggravée par l'apragmatisme (perte d'énergie), ce qui peut conduire à altérer totalement la vie normale de la personne schizophrène. Les symptômes négatifs qui touchent la vie affective du patient sont l'apathie et l'anhédonie (incapacité à au plaisir), le patient s'en fout de tout le monde et aime rester seul. Le ralentissement du flux des pensées caractérise essentiellement la perte des capacités cognitives normales, donc finalement les symptômes négatifs sont très nombreux et sculptent ce caractère unique, mystérieux, disrespectueux et parfois thug-life du schizophrène, ce qui nous ramène à un autre syndrome important de la schizophrénie....

La désorganisation:

Comme son nom l'indique, c'est une anarchie totale de l'esprit et de tous les activités normales du malade, pour bien préciser les choses, la désorganisation frappe trois rubriques principaux:

• Les pensées
• Le comportement
• Les sentiments

On commence par les pensées de l'individu qui deviennent incompréhensibles, en écoutant le discours d'un schizophrène, plusieurs mots et phrases bizarres peuvent être entendus mais à ne pas confuser avec un délire. Par exemple, le schizophrène a une tendance à inventer des nouveaux mots (néologisme) et aime les métaphores, sa façon de parler n'est pas commune mais comporte parfois des idées logiques. Le flux de discours peut être entamé brusquement ou bien le malade change de sujet rapidement. Parfois tout ce que le psychiatre écoute c'est du bla, bla, bla suite à un raisonnement incompréhensible, tous ces signes montrent un flux désorganisé et chaotique des idées.

D'un autre côté, le comportement du schizophrène est extrêmement bizarre, ce qu'on appelle en anglais "Weird attitude". Ses actions et ses mots sont totalement insolites, il peut fabriquer des scènes ou bien des histoires imaginaires sans aucun but. Il arrive parfois qu'il passe à la violence pour obtenir quelque chose, ces épisodes agressifs ressemblent à des accès maniaques ce qu'il faut redouter avant de laisser ce type de malade libre. Dans la cinématographie, généralement les soignants tiennent le malade agressif par force et lui injectent un produit calmant voire hypnotisant (généralement des benzodiazépines).

Finalement, l'atteinte de l'affectivité du schizophrène cause beaucoup de problèmes car l'interaction sociale normale est presque toujours altérée. La schizophrénie intéresse le système limbique (qui traite les émotions), cette atteinte est marquée essentiellement par une froideur anormale à l'égard de l'autrui. Parfois, un discours avec un schizophrène est sympa au début puis il devient très inconfortable, c'est ce qu'on appelle l'ambivalence affective (le changement de l'attitude vis-à-vis le même individu). De toute façon, le schizophrène à un stade avancé ne peut pas exprimer bien ses sentiments selon ce que demande la situation.

Les troubles cognitifs:

C'est la perturbation des fonctions cognitifs normales comme le calcul mental, la mémoire, la résolution des problèmes etc. Plusieurs clichés dynamiques du cerveau ont montré que des zones normalement actives deviennent éteintes au cours de la schizophrénie, donc le traitement normal de l'information devient aussi altéré (y inclus la qualité et la vitesse du traitement). Les syndromes précédents aggravent ces troubles cognitifs encore plus car le cerveau est une seule entité qui travaille en harmonie, toute altération d'une fonction quelconque peut affecter les autres fonctions mentales.

Quelques remarques importantes:

Le diagnostic de la schizophrénie est vraiment difficile, un psychiatre au début de sa carrière peut se tromper de diagnostic, c'est la raison pour laquelle il faut surveiller le patient pendant une durée suffisante avant de conclure. La collaboration des psychiatres est possible et fréquente quand le diagnostic n'est pas clair, surtout pendant le début de la maladie.

Dans cet article, je ne voulais pas m'enfoncer plus dans le tableau clinique de la schizophrénie, il suffit d'avoir le profil typique en tête et cela est important si l'objectif finale de la série est finalement de faire la différence entre les grandes pathologies psychiatriques. 

J'ai trouvé sur le internet une simulation d'une expérience schizophrénique, elle vous permet d'avoir une idée sur ce que les patients vivent chaque jour, jetez un coup d’œil...